Port-au-Prince, 23 avril 2021
ÉDITO # 7
METTRE LES PIEDS DANS LE PLAT DE LA QUESTION IDÉOLOGIQUE AU SEIN DU PARTI
Schématiquement, il existe depuis longtemps, historiquement à partir des années 1995/1999, plusieurs tendances politiques qui se côtoient, s’affrontent à l’OPL : une tendance radicale, appelée généralement « aile dure » du parti qui est l’héritière idéologique de la gauche des années 70 ; une tendance opportuniste qui, au nom de certains intérêts particuliers, est toujours prompt à s’emparer du pouvoir en surfant sur les conjonctures. Entre ses deux tendances, une autre se distingue dont les caractéristiques principales sont le renforcement du parti pour en faire un instrument de conquête du pouvoir politique dans l’objectif de changer la vie.
La première tendance, dite radicale, est celle qui s’appuie sur une rhétorique idéologique révolutionnaire, parfois dépassée, pour aborder la réalité politique. C’est la tendance des irréductibles du parti. On la reconnait facilement en ce qu’elle fait appel souvent à certaines figures historiques et structures du passé de la gauche haïtienne comme Gérard Pierre-Charles ou le PUCH. Ses tenants sont les défenseurs d’une ligne idéologique orthodoxe qui est parfois sans rapport avec l’univers complexe de la politique, lequel est fait de rapports de forces et d’intérêts qui exigent sans cesse tact et intelligence. Ceux-là, je les appelle gauchistes.
Une autre tendance est celle qui s’inscrit dans une dynamique opposée à la première et que j’appelle opportuniste. Les tenants de cette tendance ont ceci de particulier qu’ils nagent dans un flou idéologique qui permet de tout justifier. En réalité, ils sont les alliés objectifs du système dominant d’exclusion en ce sens qu’ils travaillent dans l’objectif d’enlever tout contenu idéologique à la politique. Avec eux, la politique devient une fin en soi et le parti, un instrument pour atteindre cette fin. C’est ce qui explique leur promptitude à saisir les opportunités politiques pour occuper n’importe quel poste de gouvernement. Certains des tenants de cette tendance peuvent être des transfuges de la première tendance qui renient aujourd’hui leurs passés de radicaux. Malgré ses travestissements en défenseur du parti, cette tendance politique reste et demeure identifiable car elle reste opposée à son renforcement et à son institutionnalisation. Elle est reconnaissable par ses invariants que sont les slogans creux et sans fondement et un soi-disant attachement aux statuts.
Entre ces deux extrêmes, on trouve une tendance politique qui s’appuie sur la maturité de l’expérience pour construire une position politique responsable. Sans renier l’héritage politique et idéologique de la gauche historique haïtienne, cette tendance est celle qui embrasse la complexité de l’univers politique avec discernement. Pour cela, elle entend renforcer le parti en tenant compte de la réalité complexe. C’est elle qui a fait de l’OPL un parti populaire, démocratique et institutionnel en le dotant d’instruments de gouvernance moderne. Pour les tenants de cette tendance qui s’oppose à toute orthodoxie idéologique et qui fait du dialogue une valeur, le pouvoir n’est pas une fin en soi. Voilà pourquoi ils optent toujours pour une conquête du pouvoir autour de projets politiques largement consensuels et orientés vers le bien-être collectif. Car, il ne s’agit pas de prendre le pouvoir pour le pouvoir. Ce qu’ils visent, c’est la transformation de la réalité pour qu’enfin « demain, émerge un autre pays.»
À l’aube de sa 30ème année d’existence, il importe de soulever les grandes questions qui forcent le débat sur la modernisation véritable du parti.
OPL, bientôt 30 ans!
Longue vie au Parti !!!